La juge Nicole Tremblay a reconnu que la municipalité avait le droit d’adopter ce règlement afin de répondre aux préoccupations et aux revendications de la population. « Alors que les municipalités ont le devoir de fournir une eau de qualité à leurs citoyens et citoyennes, Gastem contestait leur droit de protéger leurs sources d’eau potable. Le jugement d’aujourd’hui vient cristalliser ce droit essentiel », explique Alice-Anne Simard de Eau Secours.
Pour les groupes, cette annonce est une victoire symbolique qui pourra inspirer d’autres communautés un peu partout au Québec. « Qu’une municipalité de 160 habitants ose affronter de la sorte une compagnie pétrolière, malgré l’intimidation et les nombreuses années d’incertitude, c’est une leçon de résilience et de courage qui inspirera sans doute plusieurs autres municipalités. Cette victoire peut réellement se résumer en trois mots : David contre Goliath », se réjouit Carole Dupuis du Regroupement vigilance hydrocarbures Québec.
La Cour a ordonné à Gastem de payer plus de 160 000 $ d’ici 30 jours pour les dépenses encourues par Ristigouche Sud-Est en frais juridiques et pour la campagne de sociofinancement que la municipalité a dû mettre en branle. « Non seulement la pétrolière réclamait plus d’un million de dollars à la municipalité, un montant totalement injustifié, mais elle faisait tout en son possible pour allonger les procédures légales et siphonner les fonds de Ristigouche Sud-Est. Heureusement que la municipalité était résolue et que la population québécoise a répondu massivement à la campagne de sociofinancement », rappelle Alice-Anne Simard de Eau Secours.
Les groupes dénoncent toutefois l’inaction du gouvernement québécois sur ce dossier. « Pendant près de cinq ans, Ristigouche Sud-Est a tenté d’obtenir l’aide du gouvernement, mais ce dernier a refusé d’intervenir et a même ajouté l’insulte à l’injure en adoptant son Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection. Ce règlement est contesté par plus de 300 municipalités, dont Ristigouche Sud-Est, en raison des distances séparatrices beaucoup trop étroites qu’il impose entre les forages d’hydrocarbures et les sources d’eau. Difficile de ne pas y voir un parti pris du gouvernement Couillard pour l’industrie pétrolière et gazière », se désole Patrick Bonin de Greenpeace Canada.
Ce jugement pourrait mobiliser les citoyens et les citoyennes aux prises avec des puits de forage dans leur municipalité. « Alors que le sous-sol de plus de 50 000 km2 du territoire québécois a été vendu aux pétrolières et aux gazières sans le consentement de la population, la nouvelle réglementation proposée par le gouvernement pourrait donner le coup d’envoi à une nouvelle vague de forages qui viendraient menacer les nappes phréatiques ainsi que les bassins versants des rivières. On sent sur le terrain que les gens sont inquiets pour leur eau. Ce jugement apporte de l’espoir aux autres municipalités qui devront bientôt se battre pour protéger leur eau », affirme Jacques Tétreault du Comité des citoyens et citoyennes pour la protection de l’environnement maskoutain.
Les groupes insistent sur la portée positive de ce jugement. « Nous avons assisté à une incroyable mobilisation de la part de la population de Ristigouche Sud-Est, mais aussi de tous les citoyens et les citoyennes des quatre coins du Québec qui ont soutenu la petite municipalité pendant plusieurs années. Cette victoire, c’est vraiment la victoire de tous les Québécois et les Québécoises », conclut Christian Simard de Nature Québec.
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