Édition du 14 mai 2024

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Planète

Écologie, quel héritage politique ?

Suède, Australie, Suisse, Canada, Belgique, France… Dans ces pays d’Occident, des jeunes, très majoritairement des adolescentes ou post-adolescentes, organisent des « grèves du climat ». Elles appellent désormais à des « vendredis verts », en complément des « samedis jaunes » français des Gilets jaunes, pendant lesquels les élèves et étudiants sèchent volontairement les cours. Ces initiatives devraient atteindre leur climax lors de la « grève scolaire internationale » du 15 mars 2019 qui entend faire converger les actions au niveau mondial.

Tiré du blogue de l’auteure.

Les revendications sont claires : éviter le désastre écologique et pour ce faire interpeler les pouvoirs publics et manifester « contre l’inaction des adultes face au réchauffement climatique ». Les slogans sont rigolos : « Moins de riches, plus de ruches », « Le niveau de la mer s’élève, nous aussi », « Désolé papa, maman, je vais sécher comme la planète », « Pendant les soldes, on ne peut pas acheter une planète neuve »…

45 ans après René Dumont, premier candidat « écologiste » aux élections présidentielles françaises ayant récolté un peu plus de 1% des suffrages et porteur du message « À vous de choisir : l’écologie ou la mort », ces adolescentes, et ceux qui les ont rejointes, pensent encore pouvoir sauver le climat. Ces jeunes écologistes sont plus ou moins politisés, plutôt éduqués, de gauche et de classe moyenne, parfois membres d’organisations (associations, partis politiques, ONG), et appellent à la « désobéissance civile », par nature collective et non violente. Faisant implicitement référence à Gandhi, à Martin Luther King, aux mouvements pacifistes états-uniens, à Greenpeace et, en France, au « manifeste de 343 salopes », à l’occupation du plateau du Larzac, aux actions de la Confédération paysanne… ils interpellent les institutions, comme le Parlement européen, la Cop24 en Pologne, le Forum de Davos, les ministères…, en organisant des sittings ou des prises de parole en leur sein, dans le but qu’elles passent des paroles aux actes. Ils demandent également aux adultes de changer leurs modes de consommation.

Assiste-t-on à un renouveau de l’imaginaire contestataire ? J’aimerais volontiers le croire. Je cherche dans les revendications, les textes et autres chartes des références à une écologie critique, attachée à analyser les communs d’une transformation de la nature au service de l’humain. Je me mets en quête de liens avec des luttes existantes ou passées ou de références à des mouvements radicaux. Par exemple, que pensent ces jeunes des manifestations étudiantes contre la loi ORE ou encore de l’occupation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, férocement réprimées par les forces de police ? Comment vivent-ils les conséquences de la réforme du travail, des lois « Asile-Immigration » ou anticasseurs ? Que pensent-ils de l’écoféminisme qui s’oppose de façon radicale à la mondialisation libérale, dénonce l’instrumentalisation du vivant à des seules fins de profit immédiat par les multinationales pharmaceutiques ou agroalimentaires et par les proxénètes, qualifie le rôle prépondérant de l’attention de l’humain portée au quotidien à l‘autre, versus vision morale (bien ou mal), dans la « protection de la nature », identifie un « mythe du rattrapage » développementaliste imposés au États dits du Sud par les États dits du Nord ? Ont-ils fait la part des impacts de genre du « changement climatique » (impacts différenciés de la destruction de la planète par et sur les femmes et les hommes) ? Plus généralement, s’intéressent-ils à ces impacts sur les pauvres et sur les riches, sur les habitants du centre et de la périphérie (Occident/hors Occident), sur les « Noirs » et sur les « Blancs » ? Avec toutes ces questions, j’interroge l’héritage politique de ces nouveaux rebelles. Obtiendrai-je des réponses ?

Toujours est-il qu’en France les manifestants proches des Gilets jaunes – qu’on soit ou non d’accord avec leurs multiples revendications – sont fortement réprimés et poursuivis, alors que ces défenseurs de l’environnement (tels qu’ils s’auto-définissent) marchent tranquillement. Ai-je à craindre une manipulation politique ? Une offensive capitaliste verte ? Les contours de la mobilisation du 15 mars prochain sauront me renseigner.

Joelle Palmieri
19 février 2019

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